Sous le compost, la vérité germera-t-elle ?
Sous le compost | nicolas maleski
9 avril 2022

Titre | Sous le compost
Auteur | Nicolas Maleski
Date de parution | 2017
Nombre de pages | 256
J’ai été transportée :
🤍 Un peu
🖤 Beaucoup
🤍 Passionnément
🤍 À la folie
Nicolas Maleski bouscule l'univers de la comédie, avec un mélange des genres surprenant et une intrigue qui l'est tout autant. Portez votre regard sous le compost, voir ce qui s'y cache...
Portrait express de l'auteur
Nicolas Maleski est un auteur français né en 1978. Après s’être confronté à plusieurs rejets en maisons d’édition, c’est en 2017 qu’il publie enfin son premier roman, Sous le compost. Un livre qui lui promet une belle carrière d’écrivain, puisqu’il se classe 3e au Grand Prix RTL-Lire 2017. Ce qui intéresse Nicolas Maleski dans l’écriture, c’est avant tout de déterminer la création des images, et faire danser les mots avec poésie : « Un de mes plaisirs, c’est de créer des personnages, de les faire vivre ensemble et de créer un monde autour d’eux. » Plaisir que partage le lecteur dans Sous le compost, en découvrant un univers surprenant, aux personnages originaux, à commencer par un protagoniste au profil insolite, Fred Van Penitas.

Résumé du trajet
Gisèle est vétérinaire de campagne, Franck s’est voulu écrivain. Il est désormais père au foyer. Pas de méprise, ce statut est une source intarissable de joie. Car en plus de lui assurer un temps précieux auprès de ses filles, il le dispense de côtoyer ses semblables. Hormis la fréquentation de quelques soiffards, cyclistes tout-terrain ou misanthropes à mi-temps comme lui, Franck Van Penitas peut se targuer de mener une existence conforme à son tempérament : ritualisée et quasi solitaire. Son potager en est la preuve, où aucun nuisible susceptible d’entraver ce rêve d’autarcie ne survit bien longtemps. Franck traque la météo et transperce à coups de bêche les bestioles aventureuses. Jusqu’à ce jour où une lettre anonyme lui parvient, révélant l’infidélité de sa femme. Face à un événement aussi cataclysmique que banal, n’est pas Van Penitas qui veut. Accablement ? Coup de sang ? Répartition des blâmes ? Très peu pour lui. Franck a beau être un garçon régulier, il n’en est pas moins tout à fait surprenant et modifier son bel équilibre n’entre guère dans ses vues. Son immersion en territoire adultérin, le temps d’un été, prendra l’allure d’un étrange et drolatique roman noir conjugal.
Pourquoi se laisser embarquer
Sous le compost, il y a un univers décapant. Le point de départ du roman ? Une surprenante inversion des rôles, puisque Franck Van Penitas est homme au foyer. Dans le cadre rural d’une petite bourgade française, Franck est un écrivain raté et un ours désabusé reconverti au jardinage. Il n’est pas doué pour la vie en société, et affronte la réalité avec distance. Il conservera ce flegme légendaire même après avoir appris l’infidélité de sa femme. L’incroyable faculté de Franck réside à se laisse porter quoiqu’il arrive, sans se préoccuper des conséquences. Son leitmotiv : « Tant que le pire ne s’est pas produit, le meilleur peut encore arriver ». Entre une madame Bovary et un Jean-Pierre Bacri, Franck est un misanthrope heureux pétri de défauts, finissant par attiser la sympathie du lecteur.
Nicolas Maleski est à la fois auteur et lecteur du livre qu’il écrit. Il attache beaucoup d’importance au bon mot, à la bonne expression, à la virgule parfaite. Son écriture tangue entre trivialité et sophistication, se plaçant ainsi entre la littérature populaire, divertissante mais souvent moins travaillée, et la littérature plus élevée, bien faite mais souvent autocentrée. Il est également le roi de l’image, comme ici : « Sa poitrine se libéra avec un flegme de gélatine. » Décidément, Nicolas Maleski a le don de surprendre. Son livre aux allures de comédie désinvolte est une vraie révélation, drôle, effrontée et inquiétante. Il ne vous reste plus qu’à ouvrir ce roman inclassable pour savoir enfin ce qui se cache sous le compost…
Passage choisi
Maintenant j’avais repris le chemin du retour. Les corbeaux gravitaient toujours dans la haute plaine. Mon break filait à cent à l’heure, j’avais le plein de kérosène. À l’horizon, le versant barrait la vue, masse de granit à la crête échevelée par le vent. J’avais rencontré Gisèle au lycée. Au début c’était une élève plutôt brillante, une fille amusante à la beauté discrète – moi, j’étais celui qui préférait lire des bouquins que bosser ses sciences. On nous retrouvait souvent assis l’un à côté de l’autre, on était camarades de classe, rien de plus. Vers le printemps, elle s’était métamorphosée, du jour au lendemain, presque à mon insu, elle avait explosé. Je m’étais mis à baver pour la façon qu’elle avait de remplir ses jeans et ses débardeurs. Il n’était plus question de camaraderie. Ses tenues me donnaient la chair de poule. Une fois, j’avais failli vomir tellement ça me donnait mal au ventre. La situation avait traîné. J’avais du mal à me faire comprendre. Notre relation était étrange, nous étions à la fois proches et lointains. J’avais cru mourir cent fois, d’impatience, d’excitation, de jalousie, de découragement. Et je ne m’étais jamais senti aussi vivant qu’à partir du moment où j’avais compris qu’elle n’excluait pas de se laisser aller à un petit béguin pour moi. Il y avait eu encore quelques semaines d’incertitude langoureuse avant que je l’emballe un soir devant le bahut. Je n’avais jamais cherché à savoir pourquoi elle avait craqué pour moi. Elle avait craqué, ça me suffisait. Il s’était passé du temps depuis. Nous étions encore ensemble. Nous étions devenus un couple avec trois enfants, nous étions devenus une famille, une entité sentimentale polymorphe.
Pour aller plus loin
En 2017, RTL a décerné à Nicolas Maleski le 3e prix de son Grand Prix RTL-Lire pour Sous le compost, derrière Daniel Pennac et Tanguy Viel. Voici l’interview menée par RTL, à la rencontre d’un livre et de son auteur.
